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Covid-19 : prorogation de l’état d’urgence sanitaire et justice pénale

Pénal - Informations professionnelles, Procédure pénale
16/11/2020
Le 15 novembre 2020, a été publiée la loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire. Quelles dérogations prévues en droit pénal ? 
« L'état d'urgence sanitaire déclaré par le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l'état d'urgence sanitaire est prorogé jusqu'au 16 février 2021 inclus » dispose le premier article de la loi publiée le 15 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire (v. L’état d’urgence sanitaire prorogé jusqu’au 16 février 2021, Actualités du droit, 16 nov. 2020).
 
Cette dernière vient aussi modifier la loi du 9 juillet 2020 (L. n° 2020-856, 9 juill. 2020, JO 10 juill., v. Sortie de l’état d’urgence sanitaire : une loi votée au forceps, Actualités du droit, 10 juill. 2020) et prolonge jusqu’au 1er avril 2021 le régime transitoire mis en place.
 
 
Des ordonnances pour prolonger, rétablir ou adapter certaines dispositions
Ainsi, la loi du 14 novembre prévoit que jusqu’au 16 février 2021, le Gouvernement peut, pour faire face aux conséquences de la propagation de l’épidémie de Covid-19, prendre par voie d’ordonnance toute mesure pour prolonger ou rétablir l’application des dispositions prises et procéder aux modifications nécessaires à leur prolongation, à leur rétablissement où à leur adaptation à l’état de la situation sanitaire.
 
Il s’agit notamment des dispositions prises sur le fondement de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 permettant de prendre des mesures « adaptant, aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 parmi les personnes participant à la conduite et au déroulement des instances, les règles relatives à la compétence territoriale et aux formations de jugement des juridictions de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire ainsi que les règles relatives aux délais de procédure et de jugement, à la publicité des audiences et à leur tenue, au recours à la visioconférence devant ces juridictions et aux modalités de saisine de la juridiction et d'organisation du contradictoire devant les juridictions » (L. n° 2020-290, 23 mars 2020, JO 24 mars, art. 11, I, 2°, c).
 
En revanche, la loi exclut les dispositions prises sur le fondement du d et e du 2° du I de l’article 11 relatives au déroulement des gardes à vue, au déroulement et à la durée des détentions provisoires et des assignations à résidence sous surveillance électronique ainsi que les règes relatives à l’exécution et l’application des peines privatives de liberté et celles relatives à l’exécution des mesures de placements et autres mesures éducatives prises en application de l’ordonnance de 1945 relative à l’enfance délinquante.
 
 
Plus de souplesse pour l’affectation et le transfert des détenus
La loi prévoit donc des mesures de gestion de la crise sanitaire. Elle organise notamment plusieurs dérogations aux dispositions du Code de procédure pénale, applicables jusqu’au 31 août 2021.
 
En effet, il est prévu que « Par dérogation au premier alinéa de l’article 714 du Code de procédure pénale, les personnes mises en examen, prévenues et accusées peuvent être affectées dans un établissement pour peines ». En temps normal, les personnes soumises à la détention provisoire sont placées dans une maison d’arrêt.
 
La loi prévoit également que les condamnés peuvent être incarcérés en maison d’arrêt, et ce « quel que soit le quantum de peine à subir ». L’article 717 du même Code prévoit qu’habituellement, les condamnés doivent purger leur peine dans un établissement pour peines.
 
Enfin, « Les personnes condamnées et les personnes mises en examen, prévenues et accusées placées en détention provisoire peuvent, sans l'accord ou l'avis préalable des autorités judiciaires compétentes, être incarcérées ou transférées dans un établissement pénitentiaire à des fins de lutte contre l'épidémie de Covid-19 ».
 
Ces dispositions ont été insérées par amendement déposé au Sénat (TA Sénat, n° 79, 2020-2021, amendement n° 28). L’objectif : déroger aux règles d’affectation et de transfert des personnes détenues prévues dans le Code de procédure pénale. En effet, pour limiter les risques de contamination au sein des établissements pénitentiaires, les règles doivent être assouplies.
 
 
Une protection pour les victimes de violences intrafamiliales
La loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire dispose dans son dernier article que « Les victimes des infractions mentionnées à l'article 132-80 du code pénal ne peuvent être soumises au couvre-feu, ou maintenues en confinement dans le même domicile que l'auteur des infractions, y compris si celles-ci sont présumées ». Si le conjoint violent ne peut être évincé, un lieu d’hébergement permettant le respect de leur vie privée et familiale sera attribué. 
 
Cet article a été inséré par amendement déposé au Sénat (TA Sénat, n° 79, 2020-2021, amendement n° 71). Les auteurs ont précisé que « 10 jours après le début du confinement, le ministre de l’Intérieur a indiqué une hausse très significative des violences intrafamiliales, de 32 % dans les zones gendarmerie, et de 36 % pour la préfecture de police de Paris. Le nombre d’appels aux numéros d’écoute spécialisée a également explosé ». Ainsi, l’objectif est de préciser aux victimes qu’elles peuvent quitter le domicile.
 
 
Rappelons d’ailleurs que le ministre de la Justice a affirmé que son objectif est d’assurer au mieux la poursuite de l’activité judiciaire (v. Justice : un confinement qui s'annonce moins strict, Actualités du droit, 30 oct. 2020).
 
 
Source : Actualités du droit