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Affaire « Prothèses PIP » devant la CJUE : absence de couverture par le contrat d’assurance français des implants exportés vers un autre État membre et utilisés sur le territoire de ce dernier

Affaires - Assurance
12/06/2020
La CJUE valide la clause du contrat d’assurance responsabilité civile limitant territorialement la couverture des dommages des prothèses implantées à l’étranger.
 
En l’espèce, une personne de nationalité allemande se fait poser des implants mammaires défectueux exportés de France et produits par la société française PIP SA. Cherchant à condamner, entre autres, l’assureur de cette dernière à des dommages et intérêts, la victime saisit le tribunal régional supérieur de Francfort-sur-le-Main. L’assurance de responsabilité civile, obligatoire en France, a été souscrite par la société PIP, devenue insolvable. L’une des stipulations dudit contrat en limitait la couverture, de sorte que seule la pose des implants sur le sol français pouvait déclencher l’indemnisation. La victime fait valoir qu’elle dispose d’un droit d’action directe contre l’assureur, alors même que le contrat d’assurance comporte une clause limitant la couverture géographique, dès lors que cette clause serait contraire au principe de non-discrimination.

Saisi de l’affaire, le tribunal allemand pose plusieurs questions préjudicielles à la CJUE dont la principale est de savoir si « le fait que PIP était assurée auprès d’Allianz pour les dommages causés par ses implants en France uniquement est compatible avec le principe de non-discrimination en raison de la nationalité » contenu à l’article 18 TFUE.

Pour savoir si en l’espèce l’article 18 TFUE s’applique, précise la Cour, il faut que deux conditions cumulatives soient remplies. D’une part, la situation à l’origine de la discrimination invoquée doit relever du champ d’application du droit de l’Union. D’autre part, aucune règle spécifique prévue par les traités et visant à interdire une discrimination en raison de la nationalité ne doit trouver à s’appliquer à une telle situation.

Dans la présente affaire, la Cour a jugé que les deux ne sont pas remplies. Elle estime concernant la première des conditions « qu’il n’existe, dans le droit dérivé (notamment dans les directives 93/42 et 85/3743), aucune disposition qui énonce une obligation pour le fabricant de dispositifs médicaux de souscrire une assurance de responsabilité civile visant à couvrir les risques liés à ces dispositifs ou qui régit une telle assurance ». Afin d’évincer la deuxième, les juges européens examinent si la situation en cause se rattache à l’une des libertés fondamentales de l’Union : la libre circulation, libre prestation des services et la libre circulation des marchandises. Là encore, aucune des ces libertés n’a été enfreint.

Ainsi, conclue-t-elle, « que cette situation ne relève pas du domaine d’application du droit de l’Union, au sens de l’article 18, premier alinéa, TFUE, si bien qu’il y a lieu d’exclure l’application de cette disposition à la présente affaire ».

Selon les associations représentant les victimes, cet arrêt met en lumière les carences du droit européen - un « vide juridique - sur les dispositifs médicaux. Il est souhaitable, de lege ferenda, qu’une assurance de responsabilité civile soit obligatoire dans tous les pays européens et non pas uniquement en France.
 
Source : Actualités du droit