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Interrogation de première comparution incompatible avec l'état de santé et intérêts de la personne mise en examen

Pénal - Procédure pénale
15/06/2017
Porte nécessairement atteinte aux intérêts d'une personne mise en examen, le fait que le juge d'instruction procède à son interrogatoire de première comparution dans des conditions incompatibles avec son état de santé, peu important qu'elle n'ait, à cette occasion, pas fait de déclarations par lesquelles elle se serait incriminée. Telle est la solution retenue par un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation, rendu le 7 juin 2017.
Selon les faits de l'espèce, à la suite d'une rixe, M. L., blessé, a été admis à l'hôpital. Il a été ensuite placé en garde à vue dans un établissement hospitalier. Un examen médical a conclu à la compatibilité de son état de santé avec une mesure de garde à vue en milieu hospitalier. Il a été entendu, assisté de son conseil. Après une prolongation de sa garde à vue, celle-ci a été levée. Une information étant ouverte, M. L. a été déféré dans le cabinet du juge d'instruction qui a procédé à son interrogatoire de première comparution, avant de lui notifier sa mise en examen. Par ordonnance du même jour, le juge d'instruction a désigné un médecin aux fins d'examen médical de l'intéressé. Ce rapport a relevé que M. L. était apte à entendre une notification de contrôle judiciaire, cette notification étant intervenue à 22 heures le même jour dans les locaux de l'établissement hospitalier. Le rapport d'expertise médicale a relevé que l'intéressé était apte à ce qu'on lui notifie des éléments mais inapte à participer à des débats, inapte à la garde à vue et à une incarcération en dehors d'un cadre hospitalier. Par requête, en date du 18 juillet 2016, M. L. a soulevé la nullité de sa garde à vue, celle de sa mise en examen et des actes subséquents. Après avoir annulé les procès-verbaux de l'audition et de fin de garde à vue, réalisés au sein des locaux des services de police, l'arrêt attaqué, pour rejeter le moyen de nullité de l'interrogatoire de première comparution, a énoncé notamment que cet acte trouve son support nécessaire dans les actes d'enquête ainsi que dans le réquisitoire introductif du procureur de la République, et non dans les actes annulés. Les juges ont relevé que les pièces médicales en procédure ne montrent pas que l'état de l'intéressé aurait été incompatible avec une comparution et une audition devant le juge d'instruction. Ils ont retenu que l'intéressé assisté par son conseil a été en mesure de comprendre les enjeux de l'acte dès lors qu'il a usé de son droit de se taire.

La décision est cassée par la Haute juridiction qui juge qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (CESDH) et 116 du Code de procédure pénale, ainsi que le principe ci-dessus énoncé.

Par Aziber Seïd Algadi
Source : Actualités du droit